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Conférence du 21 avril 1920

Extrait du livre : Vers un renouveau de la pédagogie - GA301

© 2001 Éditions Triades

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La tripartition de l'être humain

Il n'est pas toujours facile de caractériser la nature spé­cifique de la science de l'esprit à partir de la forme de conscience propre à notre époque ; car il est bien évident que l'on juge d'abord une chose nouvelle que l'on ren­contre d'après ce que l'on connaît déjà. La science de l'es­prit telle qu'il en est question ici est d'une autre nature que ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui la science; non par le fait, bien sûr, qu'elle voudrait nécessairement et pour toute chose établir d'autres contenus et d'autres idées, mais par le fait qu'elle s'adresse d'une autre façon à l'ensemble de l'homme. Et c'est justement en raison de sa nature spécifique que la science de l'esprit peut être fruc­tueuse pour l'art pédagogique. Pour exprimer quelle est cette spécificité de la science de l'esprit, j'aimerais com­mencer par dire en passant ce qui suit.

Lorsque nous prenons connaissance aujourd'hui de quoi que ce soit, nous pensons que nous acquérons cer­taines représentations sur telle ou telle chose, et qu'ensuite nous emportons ces représentations avec nous pour toute la durée de notre vie, dans la mesure du moins où notre mémoire s'y prête. Nous nous rappelons les choses, et par ce fait nous les savons. Mais en réalité la science de l'esprit n'est pas propre à un tel emploi dans la vie. Certes, elle est souvent comprise ainsi du fait des habitudes établies dans la vie actuelle. Mais ceux qui la comprennent ainsi, comme un recueil de données, peut-on dire, ceux-là ne la considèrent pas sous son vrai sens. Ils considèrent quelque chose qui est bien plus proche de la vie que la connais­sance ordinaire, sensible et matérielle, d'une manière qui reste tout aussi éloignée de la vie que la manière sensible et matérielle de voir. Voyez-vous, si un homme s'en allait dire : Hier j'ai mangé et j'ai bu, je n'ai donc plus besoin de le faire de toute ma vie, vous trouveriez bien évidemment cela absurde. Car nous avons toujours à renouveler la rela­tion entre l'organisme humain et ce que cet organisme doit prendre pour lui de la nature extérieure afin d'assurer son existence, et l'on ne peut faire autrement que de satis­faire encore et toujours ce processus d'absorption et d'assi­milation. Ainsi en va-t-il sous un certain rapport avec la science de l'esprit. La science de l'esprit donne intérieurement à l'homme quelque chose qui le rend pleinement vivant, et qu'il lui faut en réalité renouveler sans cesse pour que cela reste toujours vivant en lui. Et c'est pourquoi la science de l'esprit est quelque chose qui est véritablement bien plus proche de ce qui en l'homme est créateur que ne l'est le savoir habituel, et ce qui par conséquent peut effec­tivement s'avérer être une source d'impulsions multiples pour façonner ce matériau plus précieux que tout, l'homme en devenir, lequel ne peut être pris en main de façon juste que si l'on est soi-même un artiste.

Il n'apparaîtra pas ainsi dès les premières heures que la science de l'esprit est quelque chose d'immédiatement vivant dans ce sens-là. Mais si vous avez la patience d'observer ce qui, en raison des habitudes de la vie actuelle, doit d'abord être présenté sous une forme assez abstraite, de manière à percevoir comment cela prend peu à peu réellement vie, si bien que nous n'en retirons pas seule­ment des connaissances, mais aussi une chose qui à chaque instant, à chaque heure, est en même temps une école de l'amour de la vie, alors vous remarquerez justement, grâce à cette patience, à quel point la science de l'esprit est orientée tout autrement, et combien lui font le plus de tort ceux qui, un jour, ont appris quelque chose par cette science de l'esprit et qui, ensuite, disposent de celle-ci comme d'un savoir quelconque en n'y voyant guère qu'un recueil de données sur le monde.

J'ai voulu poser cela au préalable, car les choses que je vais avoir à dire aujourd'hui sont justement à considérer tout d'abord à cette lumière. J'ai indiqué hier comment une réelle connaissance de l'homme nécessite d'envisager celui-ci à partir des points de vue les plus divers, mais également comment ces divers points de vue conduisent à embrasser les éléments physique-corporel et psycho-spirituel dans leur unité. J'ai dit alors que l'on parlait dans la science de l'esprit de l'homme physique, de l'homme éthérique, de l'homme astral et du Je individuel. Chacun de ces éléments qui constituent la nature humaine est quant à lui, sous un certain rapport, tripartite. Le corps physique est tripartite, et tous les autres éléments de l'entité humaine sont également tripartites, de sorte qu'entrent en ligne de compte, comme entrelacés, les points de vue les plus divers. Je vais essayer aujourd'hui d'éclairer la nature humaine par un tout autre côté, et vous verrez qu'il résultera finalement de ces différents éclairages une description vivante de l'entité humaine.

Sous un tout autre rapport que nous l'avons fait hier, nous pouvons en effet encore envisager l'homme sous un triple point de vue : le point de vue corporel, le point de vue psychique, et le point de vue spirituel. J'insiste expressément sur le fait que ce que je vais dire aujourd'hui se place sous un tout autre rapport, et ne coïncidera que plus tard avec ce que j'ai exposé hier. Je disais à l'instant que nous pouvons envisager l'homme du point de vue corporel. Il nous apparaît alors aussitôt comme un être tripartite. Puis du point de vue psychique, il nous apparaît à nouveau comme un être tripartite, et c'est encore le cas du point de vue spirituel.

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